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03/10/2016

L'automne

Dans un jardin cruel


À l’automne
cachée in extremis par la laurière 
j’observe un amour de méchant voisin,
son chant absurde en même temps que le compte
le compte insatisfait des douceurs
des fruits en couleur pour sa chambre d’hiver
une chambre de convoitise et d’hiver en avarice
austère et bien fermée au nez curieux
bien fermée même au nez furieux
d’une belle touffe d’asters bleus.
– Dans le froid ! les vendangeuses !
c’en est fini des anges bleus.
Résistera ? Résistera pas ?
à la frayeur subite 
d’un sourire qui s’en moque.

 

 

 

 

 

 

En forêt

L’on croit aimer les couleurs automnales
quand c’est le toit de la forêt,
ce temple,

l’été
d’un vert
qui était trop vaste.

De sa défaite alors, les fruits aimés.

 

 

 

 

 

 

 

Encore en forêt

Les forêts, en automne non plus ne sont pas sûres,
l’on y chasse et à la rosée,
dessus l’épaulement des roches je crois que
de fortes mains y tirent très lentement
les bords des mousses liserées d’or séché
et d’émeraudes pâlies sous la soif de l’été.

[silence]

Une silhouette torse échappée d’entre les arbres
fuit, dont on n’entend que le pas amoureux
à faire croustiller les feuilles mortes.

[déclaration]

Un galop d’ombre au loin,
et puis plus rien.

Une sorte de faune est passé.

 

 

 

 

 

Les fruits trop mûrs, les arbres creux *

Jour d'octobre, un automne présent et dernier. J'ai vu un cerisier peint par Seurat : une feuille verte, une feuille rouge, une feuille bistre, une feuille mousse, une feuille grenat, une feuille jade, orange brûlée,  topaze, absinthe, maïs, céladon, carmin, malachite, fleur de soufre, orpin de Perse, alizarine, anis, citrouille, lichen, garance, impérial, cuivre, rouille, roux, rubis, paille, lie de vin, sang, ocre rouge, terre de Sienne, terre d'ombre... Puis un pommier peint par Egon Schiele, un vieux pommier décharné qui étendait au chaud soleil ses courtes branches devenues osseuses, il avait le même air désolé qu'à Vienne mais d'adorables pommes rouges et nombreuses l'égayaient. Les longues tiges brouillonnes des framboisiers portaient des oiseaux et quelques fruits séchés, image vue dans un livre d'enfant trop tôt fermé. Un potager redevenu sauvage, son arrosoir proprement renversé, les branchages tressés, sur tout cela la neige tombera et une pie pourra s'y poser. Parterre chamarré de feuilles d'or, les jardins de Klimt qu'il ignore. La maison des rêves d'enfant devenue un cloître inventé où dérouler d'Anselm Kiefer les fils dorés et ceux de fer, de feu ; ma vie saupoudrée de fleurs blanches et grises ; y méditer ce que je ne sais pas penser. Le tilleul pour les cendres du futur mort, la dentelle à ses poignets, le vin en cristal, sa nature morte. Et tout ce qu'il ignore, ce qu'il ignore... Le ciel était de vase bleue** dans lequel j'ai perdu mes chagrins.


* "C'est un parc où vont les bêtes et quelqu'un s'en souvient peut-être. Les fruits trop mûrs, les arbres creux, c'était le verger du bon Dieu" Manset, 1975
** Manset, 1976

 

 
Chronique des jours-échelle